Étude comparative des facultés d’échange chez les primates non humains. - Université catholique de Lille Accéder directement au contenu
Thèse Année : 2010

Comparative study of exchange abilities in non human primates.

Étude comparative des facultés d’échange chez les primates non humains.

Résumé

Trading is a hallmark of human behaviour, and exchanges or even gifts are not commonly seen in other species. Across the animal kingdom, and especially in primates, reciprocal interactions are reported in a diversity of contexts such as social grooming, coalitions and food sharing. Some authors propose that these interactions are based on calculated reciprocity, a mechanism by which individuals keep track of what has been given and returned and consider it for future exchanges. However, the observed interactions do not provide valid support about behaviours contingency and calculation from individuals. This work aimed at studying the conditions necessary for calculated reciprocity to occur (1) by testing whether primates understand the temporal cost associated with an exchange, (2) by studying the capacity of primates to take a risk during an exchange and (3) by searching whether primates are capable to engage with a conspecific in a calculated exchange under controlled conditions. I tested seven species of non human primates in different exchange tasks: long-tailed macaques (Macaca fascicularis), Tonkean macaques (M. Tonkeana), capuchin monkeys (Cebus apella), chimpanzees (Pan troglodytes), bonobos (Pan paniscus), orang-utans (Pongo pygmaeus), gorillas (Gorilla gorilla). When considering the temporal dimension of exchange, I observed some variations in the capacity of primates to delay gratification. For a reward equivalent to eight times an initial item, capuchins could wait for 10-20 s, macaques for 40-80 s and chimpanzees for 1-2 min. In all species, both estimation of the value of goods being exchanged and anticipation of the waiting duration underlie the decision of individuals. When considering the capacity of primates to engage in a risky exchange, it appeared that most orang-utans and capuchins exchanged when the chance to gain was higher than the chance to lose. Most long-tailed macaques exchanged even when the chance to gain was lower than the chance to lose. Primates are capable to estimate gain and loss probabilities and to consider it when deciding to engage or not in an exchange. When considering the capacity of primates to reciprocate, two orang-utans were able to engage in a system of exchanges that was both stable and calculated. Contrary to orang-utans, only few begging gestures and gifts were observed in chimpanzees, bonobos and gorillas; and individuals were not capable to reciprocate. In capuchins and macaques, no begging gesture nor gifts has been observed. Although spontaneous exchange is difficult in non-human primates, this work shows that they possess some abilities to evaluate the value of goods, to accept a loss and to delay gratification, which are among the required capacities underlying economics transactions as observed in human beings.
L’être humain se distingue des autres espèces par le développement des transactions économiques. Des interactions réciproques surviennent chez des animaux comme les primates dans le toilettage social, le soutien dans les conflits ou le partage de nourriture, par exemple. Selon certains auteurs, ces interactions sont basées sur le mécanisme de la réciprocité calculée, c’est-à-dire que les sujets mémorisent les biens ou services donnés et reçus, et en tiennent compte dans leurs échanges futurs. Cependant, la seule observation des interactions ne permet pas de conclure à la contingence des comportements ou à un calcul de la part des individus. Ce travail de thèse a eu pour objectif d’étudier les conditions de la réciprocité calculée (1) en testant si les primates intègrent le coût temporel associé à un échange, (2) en étudiant leur aptitude à prendre en compte le risque inhérent à la situation d’échange, et (3) en recherchant s’ils peuvent s’engager avec un congénère dans des échanges de type calculé dans des conditions contrôlées. J’ai testé sept espèces de primates dans différentes tâches expérimentales basées sur le modèle de l’échange : macaques à longue queue (Macaca fascicularis), macaques de Tonkean (M. tonkeana), capucins bruns (Cebus apella), chimpanzés (Pan troglodytes), bonobos (Pan paniscus), orangs-outangs (Pongo pygmaeus), gorilles (Gorilla gorilla). L’étude de la dimension temporelle de l’échange montre que la tolérance au délai varie d’une espèce à l’autre. Pour une récompense huit fois supérieure à l’item initial, le délai moyen toléré est équivalent à 10-20 s pour les capucins, 40-80 s pour les macaques, et 1-2 mn pour les chimpanzés. Chez toutes les espèces, la décision de la majorité des individus se réalise sur la base de mécanismes comme l’estimation de la valeur des biens échangés et l’anticipation du délai d'attente. L’étude de la prise de risque dans l’échange montre que la majorité des orangs-outangs et des capucins n’échangent que lorsque la chance de gagner est supérieure à la chance de perdre. La majorité des macaques à longue queue échange même si la chance de gagner est inférieure à la chance de perdre. Les sujets sont capables d’estimer les probabilités de gain et de perte et de prendre en considération ces informations pour décider de s’engager ou non dans l’échange. L’étude de la réciprocité dans l’échange révèle que seuls deux orangs-outangs ont été capables de s’engager dans un système d’échange stable et calculé. Contrairement aux orangs-outangs, seuls quelques cas de quémandes et de dons ont été relevés chez les chimpanzés, les bonobos et les gorilles ; et les individus n’ont pas été capables d’échanger des biens de manière réciproque. Chez les macaques et les capucins, aucun cas de quémande ou de don n’a été observé. Bien que l'échange spontané de biens s'avère difficile chez les primates non humains, ce travail montre qu'ils possèdent à des degrés divers les facultés nécessaires pour comparer la valeur des biens, accepter un risque de perte ou retarder une gratification, qui sont autant de mécanismes à la base des transactions économiques chez l'être humain.
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Citer

Marie Pelé. Étude comparative des facultés d’échange chez les primates non humains.. Sciences du Vivant [q-bio]. Université de Strasbourg- ULP, 2010. Français. ⟨NNT : ⟩. ⟨tel-04275027⟩
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